H.P. Blavatsky et les Adeptes :
La Hiérarchie des Maîtres

Les Adeptes auxquels se référait sans cesse Madame Blavatsky laissèrent d’eux un portrait peint par Hermann Schmiechen en juin 1884 avec l’aide subtile, à ce que dit le Colonel Olcott, du Maître Morya lui-même qui, invisible pour l’assistance, se tint derrière l’artiste en vue de l’inspirer.

Lorsque Madame Blavatsky vit ces portraits, elle en acclama la ressemblance et la tonalité générale de grandeur qui s’en dégageait et qu’elle reconnaissait.

Laissés à la visite de tous, dans le Hall d’Adyar à Madras, ces portraits furent ôtés de tout regard du public à la demande du Colonel Olcott qui, tout en voulant protéger le caractère sacré de ces Images, ne souhaitait pas que la vénération qu’ils engendraient devînt un culte frisant l’idolâtrie.

Ces portraits révèlent des personnalités marquantes, certes, portant barbe et cheveux longs à l’instar, serait-on tenté de comparer, des Mages Naldjorpas tels qu’en les rencontra, cinquante ans plus tard au Tibet, A. David Néel. Le Mahatma Morya porte le fekkar radjpoute sur la tête, blanc cassé sur la toile peinte ; il était aussi souvent de couleur avec des rayures… C’est ce que le raconte le Colonel Olcott qui eut la stupeur de voir, un soir très tard, alors qu’il veillait dans son appartement new-yorkais, apparaître de manière tangible et indiscutable, le Maître, de toute sa hauteur, vêtu de blanc et portant un fekkar rayé ; le Maître lui laissa, de façon très concrète, cette coiffe en gage d’intense amitié et le Colonel Olcott la garda toujours et la mis souvent dans les moments pénibles de sa vie pour conjurer les maux que ses contemporains ne manquèrent pas de lui infliger (Henry Steel Olcott, Old Diary Leaves, t.1).

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Comment « classer » les Maîtres ? A quelle catégories de Mystiques-Mages orientaux officiellement reconnus au Tibet appartenaient-ils ? Il est probable que, dépassant toute nécessité de pareille appartenance, les Instructeurs de Madame Blavatsky fussent tout simplement des Adeptes [voir Maîtres de Sagesse] de si haut rang — ayant atteint un degré de développement de la Conscience si élevé — qu’ils bénéficièrent d’une vie parfaitement autonome et hors norme au regard des autres Mystiques proches. Ils pouvaient se déplacer, aller et venir du Japon en Chine comme le fit le Maître Kout Houmi [Cf. Lettres des Mahatmas] ou en Angleterre (rencontre d’H.P.B. avec son Maître à Londres en 1851) et en sillonnant les Indes comme le fit le Maître Morya (décrit sous le nom de Gulab Sing dans « Dans les cavernes et jungles de l’Hinsdoustan » d’H.P.B. – Ed. Adyar).

Il est clair, ainsi qu’on va le voir dans d’autres pages, qu’ils collaborèrent avec la Hiérarchie Spirituelle la plus haute du Tibet et ne se soumirent qu’au plus Grand des Adeptes, « le Chohan » pour l’accomplissement d’un travail d’envergure planétaire.

En effet, quoique étrangers à la structure officielle du Lamaïsme, les deux Instructeurs de Madame Blavatsky — le Mahatma Kout Houmi et le Mahatma Morya — s’en référaient constamment, avec une grande déférence, à un Adepte tibétain de haut rang, « le Chohan », comme étant leur Supérieur Hiérarchique. Le titre de « Vénérable Hobilgan »[1] que lui décerne le Mahatma Kout Houmi, semble le désigner comme le « Régent-Instructeur » du Panchèn Lama, Supérieur officiel du monastère de Tashi-lhunpo.

De fait, le voisinage de Shigatsé, au Tibet, place la retraite des Instructeurs de Mme Blavatsky dans l’ombre de la formidable citadelle de Tashi-lhunpo, abri du « Panchèn Lama » – abrégé tibétain du titre sanskrit « Pandita Tsang Po Lama » qui signifie « le Précieux savant en Écritures sacrées de la Province du Tsang Po » .

H.P. Blavatsky précisa :

« Il existe dans l’Himalaya un noyau d’Adeptes de différentes nationalités ; le Tashi Lama (Panchèn] les connaît et ils agissent de concert… Mon Maître [Morya] et K. H. comme plusieurs autres, que je connais personnellement, vont et viennent à cet endroit »[2].

De plus, les deux préfaciers de « La Voix du Silence », reçus par le IXe Panchèn  déclaraient explicitement : « Mme Blavatsky connaissait très bien le prédécesseur de l’actuel Panchèn Lama »[3].

Aujourd’hui, l’Occident connaît mieux le Dalaï Lama — le dignitaire qui occupe la fonction plus politique, quoique religieuse aussi — que le Panchèn Lama. Les péripéties de ce dernier, tout jeune aujourd’hui (1999) et enlevé par les Chinois a fait couler beaucoup d’encre… Toutefois, certains Bouddhistes tibétains considèrent le Panchèn comme le chef spirituel du « Bouddhisme Réformé », assumant la légitimité de la succession de Tsong-ka-pa (XIVe siècle), reconnaissant au Dalaï Lama un rôle plus « extérieur », plus exotérique .

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[1] Voir à ce sujet la recherche de Mrs. Jean Overton Fuller, op. cit infra p. 106
[2] Propos de H.P.B. dans la préface de l’édition chinoise de « la Voix du Silence »-1927.
[3] Chrismas Humphrey Papers, Theosophical Library, Londres.