Autobiographie Inachevée

Édition Lucis Trust

Dos :

Cet ouvrage d'Alice Bailey exprime une dualité entre son service de Disciple du Maître Koot Humi, qui comprend la création de l'École Arcane, et son hésitation première à collaborer au travail du Tibétain, le Maître Djwhal Khul. Il s'agissait alors de réaliser une série de livres présentant la phase suivante de l'enseignement de la Sagesse Ancienne pour le présent et le futur immédiat.

Il était prévu trente ans de travail. En décembre 1949, trente jours après l'accomplissement de cette œuvre. Mme Bailey fut délivrée des limites de son véhicule physique.

Cette rapide délivrance explique le fait que l'autobiographie reste inachevée.

Préface :

Les quatre premiers chapitres de cette autobiographie ont été écrits au cours e l'année 1945. Les chapitres cinq et six ont été écrits en 1947. Ces dates sont significatives par rapport aux événements mondiaux de l'époque.

Le premier manuscrit dactylographié fut réécrit en 1948. Le tout fut relu par Alice Bailey qui apporta certaines corrections. A plusieurs reprises, différentes personnes travaillèrent sur le texte avec elle, et des copies d'extraits furent confiées à quelques personnes pour des commentaires. Dans certains cas, ces copies ne furent pas rendues et, dans tous les cas, elles sont incomplètes, inexactes sur certains points et n'ont pas reçu d'elle l'approbation finale.

Quatre parties de plus étaient prévues pour cette autobiographie, mais jamais elles ne furent écrites. La pression énorme du travail, organisé à l'échelle mondiale, dont Alice Bailey était responsable, les conditions de tension et de confusion de l'humanité auxquelles elle était extrêmement sensible, la disposition à la futilité et, par conséquent, à la négativité des hommes de bonne volonté de partout, qu'elle cherchait vigoureusement à compenser, la tension causée par des finances insuffisantes à l'expansion du travail mondial, la frustration et la déception dues à l'incapacité de répondre au besoin et, souvent, l'incapacité à tirer avantage des opportunités, simplement parce que les dollars manquaient, voilà quelques-unes des contraintes qui contribuèrent à provoquer un état de complet épuisement. Le corps physique n'avait pas de répit. L'état du cœur et du sang empirait inexorablement.

Pendant les deux dernières années de sa vie, elle combattit ces pressions et ces conditions avec une volonté de fer. Sa personnalité de premier rayon s'éleva jusqu'à l'ultime effort, en réponse à la demande de son âme. C'est en 1946 qu'elle prit la décision de refuser l'invalidité. En conséquence, chaque jour, comme cela avait été l'habitude de toute sa vie, elle travailla jusqu'à la limite de ses possibilités physiques, sans considérer la fatigue ni la douleur. Elle choisit de poursuivre un travail actif et toujours sur la brèche, et elle s'y tint. Même pendant les derniers jours, à l'hôpital de New York en 1949, elle reçut des visiteurs, tint conseil avec les exécutants avancés et écrivit des lettres.

Quand l'heure de la mort arriva, son propre Maître, K. H., vint la chercher comme il l'avait depuis longtemps promis.

Le matin qui suivit sa mort, j'envoyais la lettre suivante à des milliers de ses étudiants et de ses amis, partout dans le monde :

"Cher ami,

Cette lettre vous apporte la nouvelle de la fin d'un cycle et du début d'un autre cycle de plus grande utilité et moins restreint pour celle qui fut votre véritable amie et aussi la mienne, Alice A. Bailey. Elle a été délivrée, dans la paix et la sérénité, le mardi après-midi 15 décembre 1949.

Comme nous conversions ensemble, ce dernier après-midi, elle dit : "J'ai tant à remercier. J'ai eu une vie riche et pleine. Tant de gens dans le monde entier on été si gentils avec moi".

Il y avait déjà longtemps, longtemps, qu'elle désirait s'en aller et elle n'était retenue que par sa puissante volonté de terminer sa tâche et par son ardent désir de compléter les dispositions pour l'avenir de l'École Arcane, qui devaient nous aider à être, pour nos compagnons, de meilleurs serviteurs.

Elle a façonné et moulé le modèle de notre École pendant des années, avec la précision de son mental aiguisé et elle l'a empli de la puissance magnétique de son grand cœur, forgé par la douleur.

Certains ont demandé pourquoi elle avait eu à souffrir, car elle souffrit, mentalement, émotionnellement, autant que physiquement. Je suis seul à savoir à quel point elle réussit à s'ouvrir à l'impact des diverses forces destructrices qui sont si effrénées en cette époque d'agitation mondiale et de quelle façon stupéfiante elle les transmua, sauvegardant ainsi tous ces aspirants et ces jeunes disciples qui luttent sous la pression pénible de l'époque, et qui sont venus à elle et à son École au long des années.

C'est, de loin, la partie subjective de son travail qui a été la plus grande. Nous en avons vu les effets extérieurs, observé ses allées et venues, nous l'avons aidée et aimée, quelquefois critiquée, quelquefois plainte, mais nous avons toujours continué avec elle et, grâce à elle, d'une manière sûrement plus élevée et meilleure que ce n'aurait été le cas autrement. Nous sommes tous très humains et, elle aussi, elle était très humaine.

Pourquoi souffrit-elle ? Parce que le sentier choisi par elle est sur la ligne des Sauveurs du Monde. Elle est retournée près de son propre Maître, K. H., pour un travail encore plus intense, avec lui, pour le Christ.

Elle nous demande de conserver l'École Arcane aussi rayonnante qu'elle l'est à présent, de la garder emplie du pouvoir salvateur de cette réunion de cœurs aimants, qui est réel, et de veiller à ce que nous servions véritablement.

Sincèrement vôtre,
Foster Bailey
New York, 16 décembre 1949.
© Lucis Trust

Introduction :

Ce qui me décida finalement à écrire ma vie fut une lettre d'un ami écossais, reçue en 1941, qui me disait que je rendrais vraiment service si je pouvais montrer aux gens comment je devins ce que je suis à partir de ce que j'étais. Il pouvait être utile de savoir comment un travailleur chrétien, orthodoxe enragé, peut devenir un fameux instructeur occultiste. Les gens apprendraient beaucoup en découvrant comment un étudiant de la Bible, de mentalité théologique, peut parvenir à la ferme conviction que les enseignements de l'Orient et ceux de l'Occident doivent être fusionnés et mêlés avant que ne puisse apparaître la vraie religion universelle que le monde attend. Il est précieux de savoir que l'amour de Dieu date d'avant le christianisme et ne connaît pas de frontières. Ce fut la première et la plus difficile des leçons que j'eus à apprendre et il me fallut longtemps. Tous les fondamentalistes ont besoin de beaucoup de temps pour apprendre que Dieu est amour. Ils l'affirment, mais ne le croient pas dans la pratique ; je veux dire dans la pratique de Dieu.

J'aimerais montrer, entre autres choses, comment le monde des êtres humains s'ouvrit à une femme anglaise, très consciente de sa classe, et comment le monde des valeurs spirituelles, avec son gouvernement spirituel intérieur, direct, devint un fait prouvé pour une chrétienne à la mentalité excessivement étroite. Je rends gloire au nom de chrétien, mais j'appartiens maintenant à l'espèce inclusive et non à l'exclusive.

Une des choses que je cherche à révéler est le fait de la direction intérieure des affaires du monde et je cherche à familiariser un plus grand nombre de gens avec le fait de l'existence de Ceux qui ont la responsabilité, dans les coulisses, de la direction spirituelle de l'humanité et de la tâche de conduire l'espèce humaine des ténèbres à la Lumière, de l'irréel au Réel et de la mort à l'Immortalité.

Je veux rendre les disciples du Christ, qui sont les Maîtres de la Sagesse, aussi réels pour vous qu'ils le sont pour moi et pour des milliers d'autres personnes dans le monde. Je ne veux pas parler d'une réalité hypothétique (si l'on peut employer une telle expression) ou d'un sujet de foi ou de croyance. Je veux les montrer tels qu'ils sont, disciples du Christ, hommes vivants et facteurs toujours présents dans les affaires humaines. Ce sont ces choses qui importent et non les expériences terrestres ou les événements survenus dans la vie de l'un de leurs travailleurs.

J'ai vécu plusieurs incarnations en une seule. J'ai avancé fermement, mais avec des difficultés extrêmes (psychologiques et matérielles) dans un champ toujours plus vaste d'utilité. Je veux montrer qu'à chaque cycle d'expérience, j'essayais sincèrement de suivre une direction venue de l'intérieur et que, lorsque je le faisais, c'était réellement un pas en avant dans la compréhension et, par conséquent, une plus grande capacité à aider. Le résultat de cette marche en avant, apparemment aveugle (comme lors de mon mariage et de ma venue aux États-Unis), fut une opportunité élargie. J'ai joué beaucoup de rôles dans ma vie. J'ai été une petite fille malheureuse, extrêmement désagréable, une jeune fille de la société dans les joyeuses années 1890 (que je ne trouvais pas tellement joyeuses), une évangéliste du type "Billey Sunday" et un travailleur social. Pas tellement joyeuse, si ce n'est que j'étais jeune et terriblement intéressée par toute chose. Plus tard, j'épousai Walter Evans et je me retrouvai dans le rôle de femme de recteur de l'Église protestante épiscopale en Californie, et mère de trois filles.

Cette expérience variée de la vie et du travail en Grande-Bretagne, en Europe, en Asie et en Amérique, amena des changements fondamentaux dans mon attitude envers la vie et les gens. Rester fixé sur un certain point de vue m'apparaît comme un manque d'intelligence. Cela signifie qu'il arrive un point dans le développement individuel où l'on cesse d'apprendre, où l'on manque à extraire la signification des événements, des écoles de pensée et des circonstances et où l'on reste immobile mentalement devant la vie. C'est un désastre. C'est le mal. C'est sûrement cela l'enfer. La terreur de l'enfer (auquel je ne crois pas du point de vue orthodoxe) doit résider dans cette uniformité continuelle, dans l'incapacité de changer les conditions.

Je devins ensuite étudiante en occultisme, écrivain de livres connaissant une diffusion ample et constante et traduits dans beaucoup de langues. Je me retrouvai à la tête d'une école ésotérique - tout à fait involontairement et sans aucune intention préalable - et organisatrice, avec Foster Bailey, d'un Mouvement International de Bonne Volonté (pas un mouvement pour la paix), lequel fut un tel succès que nous avions des centres dans dix-neuf pays lorsque la guerre éclata en 1939.

Je n'ai donc pas été inutile dans le domaine du service mondial, mais je ne veux ni ne peux proclamer que mon succès ait été dû uniquement à mes efforts personnels. J'ai toujours eu le bonheur d'avoir de merveilleux amis et des aides qui, au fil des années, sont toujours restés mes amis quoi que j'aie pu leur faire. J'ai eu beaucoup d'amis et un nombre étonnamment faible d'ennemis. Ces derniers ne m'ont pas fait de mal réel, peut-être parce que je ne pouvais les détester et que je pouvais toujours comprendre pourquoi ils me détestaient. Mon mari, Foster Bailey, pendant vingt-cinq ans, rendit possible l'ensemble de mon travail. Sans lui, je sens que je n'aurais pu en accomplir que très peu. Quand il y a compréhension et amour profonds et constants, respect et camaraderie, on est vraiment riche. Il a été pour moi solide comme une tour et tel "l'ombre d'un rocher sur une terre assoiffée". Il y a des choses qui perdent à être exprimées par des mots et paraissent dépourvues de signification et futiles, une fois écrites. Notre relation est de celles-là. Pendant bien des vies nous avons dû vivre et travailler ensemble et, ensemble, nous envisageons qu'il y en aura beaucoup d'autres. Je n'ai rien à dire de plus sur ce sujet. Qu'aurais-je fait, je me le demande souvent, sans l'amitié compréhensive et la solide coopération de tant d'amis et de compagnons de travail qui, tant d'années, se sont tenus près de moi ? Je ne peux en dresser la liste, mais ce sont ces gens-là qui sont essentiellement les responsables du succès du travail que, comme groupe, nous avons accompli.

La raison de cette autobiographie est donc triple, car il y a trois chose sur lesquelles je veux mettre l'accent et qui, je l'espère, apparaîtront clairement.

La première, c'est le fait des Maîtres de la Sagesse qui œuvrent sous la direction du Christ. Je veux rendre plus claire la nature de leur travail. Je veux les présenter au monde tels que je les connais personnellement parce que, dans les années à venir, de plus en plus de gens témoigneront de leur existence et j'aimerais rendre la voie plus facile pour eux. Je développerai ceci plus loin et je montrerai comment j'en vins à connaître personnellement leur existence. Dans la vie de chacun il y a certains facteurs de conviction qui rendent l'existence possible. Rien ne peut altérer la conviction intérieure. Pour moi, les Maîtres sont un facteur de cette sorte et cette connaissance a constitué dans ma vie un point de stabilité.

La seconde chose que j'aimerais faire, c'est indiquer quelques-unes des tendances nouvelles du monde actuel, qui sont en voie d'influencer nettement le genre humain et d'élever la conscience humaine. Je veux indiquer quelques-unes des idées nouvelles qui apparaissent dans le monde de la pensée humaine, venant du groupe intérieur des Maîtres, et qui produisent une culture et une civilisation nouvelles et - incidemment, sous l'angle de l'éternité - détruisent beaucoup de formes anciennes et bien-aimées. Ainsi que bien des gens qui réfléchissent, j'ai vu, dans ma vie, la disparition de beaucoup de choses qui étaient sans valeur dans le domaine de la religion, de l'éducation et de l'ordre social. Et c'est très bien.

En regardant en arrière, je ne peux rien imaginer de plus épouvantable que la perpétuation de l'ère victorienne par exemple, avec sa laideur, sa suffisance, le confort excessif des classes prétendues élevées et la condition effrayante où se débattent les classes laborieuses. C'est dans ce monde ouaté, poli et confortable, que je vécus, jeune fille. Je ne peux rien imaginer de plus destructeur pour l'esprit humain que la théologie du passé, prônant un Dieu qui sauve un petit nombre de privilégiés et condamne la majorité à la perdition. Je ne peux rien imaginer de plus favorable à l'inquiétude, à la lutte des classes, à la haine et à la dégradation, que la situation économique du monde, situation grandement responsable de la présente guerre mondiale (1914-1945).

Dieu merci, nous sommes sur le chemin de choses meilleures. Le groupe qui a partagé notre travail, associé à bien d'autres groupes répondant à la même inspiration d'amour pour l'humanité, aura accompli sa petite part en introduisant beaucoup de changements nécessaires. La tendance mondiale vers la fédération, vers la compréhension et la coopération et vers les choses qui peuvent profiter à tous et non seulement à quelques élus, est d'une ampleur encourageante. Nous sommes en route vers la fraternité.

La troisième chose que j'aimerais faire est montrer combien les êtres humains sont merveilleux. J'ai vécu sur trois continents et dans beaucoup de nations. J'ai connu le plus riche et le plus pauvre dans une vraie amitié; les plus haut placés dans le monde ainsi que les plus humbles furent mes amis. Dans toutes les classes, toutes les nations et toutes les races, j'ai trouvé la même humanité, la même beauté de pensée, le même sacrifice de soi et le même amour des autres, les mêmes péchés et les mêmes faiblesses, le même orgueil et le même égoïsme, la même aspiration et les mêmes objectifs spirituels et le même désir de servir. Si je peux réussir à le faire apparaître avec clarté et force, cela justifiera ce livre.

Dans le long enchaînement de l'histoire humaine et placée à côté des grandes figures du monde, qui est Alice Ann Bailey ? Une femme tout à fait sans importance qui fut forcée (généralement contre sa volonté) par les circonstances, par une conscience envahissante et par la connaissance de ce que son Maître voulait qu'il soit accompli, d'entreprendre certaines tâches. Une femme qui fut toujours effrayée par la vie (en partie sans doute à cause d'une enfance trop protégée), qui est naturellement si timide que, même aujourd'hui, lorsqu'elle doit se rendre à un déjeuner, elle doit rassembler tout son courage pour sonner à la porte ; qui est très femme d'intérieur et aime la cuisine et la lessive (et Dieu sait qu'elle en a eu sa part) et qui déteste la publicité. Je n'ai jamais été robuste, mais j'ai une énorme vitalité. Tout au long de ma vie, j'ai été forcée de passer des semaines et parfois des mois au lit. Durant les huit dernières années, je suis restée en vie grâce à la science médicale, mais - et c'est une chose dont je peux dire que je suis fière - j'ai continué à travailler en dépit de tout cela. J'ai trouvé la vie très bonne, même quand je suis passée par ce que les gens considèrent comme les pires moments. Il y a toujours eu tant à faire, tant de gens à connaître. Je ne me plains que d'une seule chose, c'est d'avoir toujours été si fatiguée. Dans un vieux cimetière d'Angleterre, il y a une pierre tombale qui porte des mots que je comprends parfaitement :

"Ci-gît une pauvre femme qui fut toujours fatiguée.
Elle a vécu dans un monde qui demandait trop.
Ne pleurez pas sur moi, mes amis : je m'en vais dans un pays
Où il n'y a plus de poussière, de balayage ou de couture à faire.
Ne pleurez pas sur moi, amis, quoique la mort nous sépare.
Je m'en vais pour ne rien faire, à tout jamais."

Alors ce serait vraiment l'enfer et je ne voudrais pas y aller ! Je veux prendre corps nouveau et plus adapté, trouver le même groupe de travailleurs et poursuivre le travail. Si l'histoire de ma vie encourage une quelconque personne à aller de l'avant, ce livre sera méritoire ; s'il conduit quelqu'un qui aspire à se lancer dans l'obéissanceà l'impulsion spirituelle, quelque chose sera gagné et si j'apporte force et courage et le sens de la réalité à d'autres travailleurs et disciples, ce sera bien.

Vous verrez qu'en tant qu'histoire d'une vie, la mienne importe peu. Mais en tant que preuve de certains faits que je sais essentiels au bonheur et au progrès futur de l'humanité - le fait des Maîtres, le développement futur dont la guerre mondiale qui vient de s'achever n'est qu'une étape préparatoire, et la possibilité de contacts spirituels télépathiques et de connaissance directe - ce que je dis peut être utile. Beaucoup de mystiques, de disciples, d'hommes et de femmes isolés et qui aspirent ont connu toutes ces choses au cours des âges. Le temps est venu où la masse des hommes de partout doit aussi les connaître.

Donc allons-y pour l'histoire de ma vie. Ne vous y trompez pas. Cela ne va pas être une effusion profondément religieuse. Je suis une personne pétulante et pleine d'humour et presque toujours prête à voir le côté drôle des choses. Entre nous, le profond intérêt des gens pour eux-mêmes, pour leur âme, et tout l'imbroglio d'expériences qu'ils racontent, me stupéfient presque. Je veux les secouer et leur dire : "Sortez de là et trouvez votre âme dans les autres et, ainsi, découvrez-vous vous-mêmes". Ce qui se perpétue dans le mental des hommes, dans leur cœur, et ce qui arrive dans le monde des hommes, est d'un intérêt fondamental. La large vision du progrès humain depuis les temps primitifs jusqu'à l'aube de la nouvelle civilisation est digne d'intérêt et importante spirituellement. Les révélations du mystique des temps moyenâgeux ont leur place, mais appartiennent au passé ; les réalisations de la science moderne (bien que l'homme ne les utilise pas dans ce sens) sont un facteur spirituel moderne majeur ; la lutte qui se poursuit entre les idéologies politiques, entre le capital et le travail, et la chute de nos systèmes éducatifs du passé, tout indique qu'un ferment divin et spirituel fait lever l'humanité. Cependant, la voie d'introspection mystique et d'union divine doit précéder la voie occulte de réalisation intellectuelle et de perception divine. C'est toujours ainsi dans la vie de l'individu et de l'humanité prise comme un tout. Le chemin mystique et le chemin occulte, le chemin du cœur et celui de la tête, doivent fusionner et se mêler ; alors l'humanité connaîtra Dieu et ne se contentera plus de soupirer après Lui, au cas où, par hasard, elle le trouverait.

Cette connaissance personnelle de Dieu viendra toutefois en vivant normalement et de la manière la plus belle possible, en servant et en s'intéressant aux autres, en étant ainsi décentralisé. Elle viendra en reconnaissant la juste vie et le bien se trouvant dans chaque peuple, par le bonheur et une juste appréciation des opportunités, les siennes et celles des autres peuples. Cela vient par une vie pleine et complète. Dans le cimetière anglais où mes parents sont enterrés, il y a une pierre tombale, la première qui accroche le regard en entrant, avec ces mots : "Elle a fait ce qu'elle a pu". Elle m'a toujours paru lugubre, et l'épitaphe d'un échec. Je regrette de n'avoir pas fait tout ce que je pouvais, mais j'ai toujours fait de mon mieux, tel que je le voyais sur le moment. J'ai travaillé. J'ai fait des erreurs. J'ai souffert et je me suis réjouie. J'ai eu un magnifique temps dans la vie et je ne vais pas avoir un mauvais temps dans la mort.

Alice Ann Bailey
Introduction
Autobiographie Inachevée
© Editions Lucis Trust 1991
 
 
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